État du Sinaloa, une étape pas comme les autres au Mexique!

Ce projet de Transpacifique à la voile était un des plus gros point d’interrogation de notre voyage. Allions-nous trouver un embarquement, un capitaine sérieux, bref un tas de question qui contribuait aux doutes. Soyons honnêtes, le milieu de la mer regorge de capitaines farfelus et de bateaux simplement bons à rester amarrés au ponton.

Il est indispensable de faire connaissance pendant un temps assez long avec un capitaine avant de passer des mois ensemble, confinés, dans un si petit espace et surtout sans échappatoire possible !
Avis aux amateurs de voilier-stop, ne foncez pas tête baissée lorsque la première réponse positive arrive.

Notre expérience des pontons Martiniquais nous aura appris à ne pas mettre nos oeufs dans le même panier et à prendre le temps nécessaire à la réflexion. L’euphorie des départs peut parfois nous faire perdre la raison. D’un capitaine dit expérimenté avec de fantastiques histoires québécoises, c’est transformé en novice décalant sans cesse le départ et recherchant l’âme soeur. Il nous aura fallu 3 après-midis et une visite du bateau avant d’annuler.

La région de San Carlos où est le voilier Hopalong!
San Carlos, État de Sonora

Au Mexique, le temps presse, le capitaine Andrew est disponible en février puis repart chez lui. Alors, avec Sandrine nous avons pris la décision de faire un aller-retour en bus pour le rencontrer. De notre côté on s’était fixé un trajet accompli 100% à la force de nos jambes. On va donc laisser les vélos, valider le capitaine, retrouver nos montures et refaire cette route, mais à vélo.

Beaucoups auraient bourrés les vélos au fond de la cale du bus. Ce serait “naze” comme dirait Sandrine. Après 17 heures de bus, une descente à chaque village, souvent sous le regard des militaires, on navigue enfin avec Andrew.

Une fois la décision commune prise de partir dans le Pacifique au départ de San Carlos, nous pouvions désormais nous engager plus sereinement dans les 900 derniers kms de cette traversée du Mexique.
Cette ligne Panamà – San Carlos nous la voulons intégralement à la force des jambes, sans aides motorisées pour faire avancer ces engins métalliques qui transportent nos affaires. Ce sera finalement 8900 km que nous auront parcourus à vélo.

Mentalement, on est prêt à traverser un des états les plus tendus du Mexique pour de nombreuses raisons.

Entrée dans le Sinaloa

Ce nom résonne tristement comme le fief d’une des plus grosses organisations maffieuses d’Amériques, sous le nom du cartel de Sinaloa. Bien connu également pour être la région native d’El Chapo, The baron de la drogue. Rien que ça ! Personnalité paradoxalement appréciée dans la zone pour avoir concrètement aidé les communautés locales de ses propres mains et le système scolaire rural. D’un autre côté, il est directement responsable d’innombrables morts.

Dans tous les états que nous ayons traversés au Mexique sauf peut-être le Chiapas, les cartels tous aussi puissants sont implantés. La situation n’est donc ni nouvelle, ni surprenante. Cependant, c’est la première fois en trois mois dans le pays que nous voyons de nos propres yeux une partie du fonctionnement de ces organisations.

Alors que nous approchons la ville de Culiacán, nous remarquons fréquemment des hommes aux talkies-walkies.
Un ou deux, bon, c’est le hasard, mais un sur chaque pont, ça commence à être louche. À chaque pont d’autoroute sous lequel nous pédalons, la même cérémonie: deux mobylettes, casquettes et “talkies”, regards fixent, ils parlent dans leurs radios, puis nous encouragent par des pouces en l’air.

Au quatrième, un des jeunes enfourche sa moto, se met à nous suivre puis ralentit à notre hauteur. La pression monte d’un cran à ce moment. La discussion s’engage par les questions classiques: “Que faites-vous, où allez-vous, depuis quand ? Pendant quelques minutes nous expliquons le chemin parcouru, tout en pédalant. Ça n’est peut-être qu’une illusion, mais on se sent moins vulnérables en mouvement plutôt qu’à l’arrêt.
Il trouve la “bici” de Sandrine super cool, nous fait des compliments sur le périple, puis en souriant nous souhaite “bonne chance”, avant de faire demi tour et tirer un coup de feu en l’air.
Non, c’était une blague.

Nous comprenons peu à peu qu’ils surveillent les entrées et les sorties de leurs territoires. Le scénario se répétera à plusieurs reprises, notamment entre Culiacán et Guamuchil, mais toujours avec la même finalité encourageante. Nous sommes simplement de passage et ne perturbons en aucun cas leurs intérêts. À l’unanimité des locaux nous courons peu de risques à voyager en journée.

Campement au Commissariat de Quilá ( Sinaloa)

La deuxième raison pour laquelle le Sinaloa se différencie est sans aucun doute l’exceptionnelle hospitalité et générosité des ses habitants.

Quotidiennement les voitures s’arrêtent pour nous tendre un billet, des boissons et des biscuits, ou simplement discuter.
Dans le reste du pays ces gestes existent, mais sont plus rares.

En témoigne cette journée du 14 février 2022. Alors que nous galérons franchement à trouver un lieu correct pour manger dans la ville de Los Mochis, un petit resto se démarque du lot. En chemin vers le rancho, camping potentiellement inexistant, nous décidons de bouleverser notre habituel tortillas-tomates-avocats à 40 pesos, pour un vrai repas à 150 pesos. La serveuse, super sympa, n’est autre que la patronne du comedor. Le temps d’être servi, elle connait presque toutes nos péripéties pour en arriver à sa petite boutique aujourd’hui. Ses yeux en disent long sur l’envie d’un tel voyage, ça pétille. Angelica propose soudainement de nous ouvrir sa maison pour le soir. Finalement, on mangera pour 0 pesos et on dormira au chaud. En échange on nettoiera la maison de fond en comble et réparons les bikes usés des gamins du quartier.

Voilá un pneu recousu par Sandrine et c’est repartis!

Les caïds du quartier qui nous font découvrir les musiques tendances au Mexique.

Le Sinaloa c’est également l’utilisation massives de pesticides. La dernière fois qu’on avait vu de telles pratiques était au Costa-Rica. Nous voilá ici dans la capitale Mexicaine de l’agrochimie, et de la communication manipulatrice de ce même lobby. Ici BayerBayer déverse ses produits à tête de mort pour optimiser l’agriculture locale.

Un cas d’école de Greenwashing.

Pour les défenseurs de la “graines paysannes et des tomates anciennes qui s’adaptent” que nous sommes, se balader dans ces contrés est franchement exaspérant.

L’épandage à l’avion des produits toxiques est monnaie courante et la monoculture à perte de vue est reine. Les avions nous survolent, on respire à pleins poumons, c’est super bons.👽

Pris la main dans le sac!!
Allez on respire! Bayer a dit que c’était bon!

Évidemment les enjeux économiques écrasent la moindre question sur le respect de l’environnement qui n’est simplement pas aussi rentable dans un premier temps. Aprés tout, pourquoi Bayer-bayer changerait son énorme business sous prétexte de réspecter la terre qui nous nourris tous?! Pas sur que l’idée leurs soient longtemps restés en tête.

La note positive est que durant notre voyage nous avons rencontrés des projets agricoles aux pratiques bien plus respectueuses et qui fonctionnent très bien, en nourrissant abondamment ceux qui l’entretiennent. Que ce soit aux jardins partagés de Gaiac en Martinique,
à la Cueva del Drago au Panamá, sur l’Île Ometepe au Nicaragua, ou encore chez Angelica au Guatemala, la lutte contre l’usage massif des pesticides est présente.

Ces étendues d’OGM contrastent tellement avec la côte sauvage. Les dunes à perte de vues nous redonnent le moral. Par des gros détours nous accédons à ces lieux ressourçants.

Le meilleur de ce que le Sinaloa peut offrir!!

Il nous faudra attendre l’entrée dans le désert de Sonora pour de nouveau écouter le chant des oiseaux, respirer à plein poumons l’air pur et observer les papillons nous suivre.

Alamos, Sonora
Alamos, Sonora
Arrivée au voilier. San Carlos, Sonora

Une rennaissance, pour la visite d’un de nos états préférés du Mexique, et le dernier du périple à terre.

On est dans un état d’esprit très positif, mais nous avons une pensée pour le peuple ukrainien qui traverse des heures noires bien plus rudes et tragiques que les plus terribles tempêtes en mer! 😔

Publié par Un Tour d'Aile

Tour du monde à vélo, voilier-stop et parapente.

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